Depuis mercredi 19 mai, l’ensemble des expositions du Mérignac photo 2021 ont pu ouvrir leurs portes au public. Quelle épopée que ce projet “Des mondes possibles” dans un monde impossible !!!
Une belle rencontre au détour d’un jury aux Rencontres de la photographie de Niort avec Ingrid Bourgeois, chargée de mission arts visuels de la Ville de Mérignac aurait dû trouver son aboutissement au printemps 2020. Mais ce monde, si imprévisible, en aura décidé autrement…
On pourrait croire alors à des lendemains incertains. Et pourtant La Ville de Mérignac aura fait preuve d’un soutien sans faille au projet, en adaptant et en maintenant contre vents et marées le cap qui nous amène aujourd’hui à pouvoir présenter ce bel événement.
Cette édition du Mérignac Photo a donc pour thème « Des mondes possibles ». Celui-ci se révèle d’une incroyable actualité, bien que pensé dès 2019 à la suite d’une invitation à effectuer une résidence curatoriale, où très vite j’ai été interpellée par les réalités du territoire : Histoire maritime, aérospatiale, identités et appartenances régionales, passé colonial… incertitudes et nécessités écologiques pour le futur.
J’avais envie de proposer un thème qui tente d’éclairer les réalités qui sous-tendent ces enjeux, et de les replacer dans un contexte universalisé.
Ainsi, « Des mondes possibles » questionne notre rapport au(x) temps, à l’interdépendance entre passé, présent et futur. C’est aussi une programmation qui propose de penser l’évolution de notre rapport aux images, leur rôle dans notre connaissance et notre compréhension du monde.
« Des mondes possibles » se déploie dans 4 lieux, et chacun d’entre eux a une couleur particulière. Cependant, s’agissant d’un sujet qui questionne justement l’arbitraire de certaines frontières mentales et/ou physiques, il paraissait important de laisser la possibilité à des connexions et interprétations multiples de se faire. Chaque œuvre, chaque lieu répond aux autres, y renvoie, essaye d’installer un dialogue, une dynamique d’associations et de rebonds où chacun pourra créer son propre récit, sa propre interprétation.
Il est intéressant de relever que chacun des projets présentés par les artistes du Mérignac photo 21 sont issus de recherches au long court, des sujets qui portent durablement leurs questionnements. Tous entretiennent un rapport engagé, préoccupé sur les devenirs du monde et les cheminements qui nous y ont conduits.
Ici se découvrent la poésie déchirante du « Passage » de Mohau Modisakeng, les territoires absurdes de Rubén Martín de Lucas, les entreprises hasardeuses de Guido van der Werve ou de Jennifer Niederhauser Schlup…
Là, s’élaborent les territoires fantasmés par Juliette Agnel, Aurélien Mauplot, Sandrine Elberg, Michel Le Belhomme, Vincent Chevillon ou Thierry Fournier.
À l’incertitude qui s’exprime au travers des images de Lionel Bayol-Themines, de Gideon Mendel ou de Broersen & Lukács, à la vision hallucinée des imaginaires artificiels de Grégory Chatonsky, sembleraient vouloir répondre d’autres manières d’habiter le monde, d’autres formes d’organisation, d’autres rapports au vivant et à sa hiérarchisation.
Un monde fait d’utopies minuscules, qui par la voix de Nelly Monnier & d’Eric Tabuchi, réinterrogent la norme et sa transgression.
Un monde où l’affirmation des interdépendances avec le vivant pourrait, comme chez Maryse Goudreau, Meryl McMaster ou Léa Habourdin, rééquilibrer notre rapport à la nature et à l’idée de communauté.
Au bord de l’engloutissement, retrouver un équilibre face à la ligne d’horizon.